On croît tous que c'est super simple d'être totalement ridicule, mais ça dépend toujours de tous et chacun. Moi, j'ai la chance d'avoir cette fibre toute naturelle, la faculté d'oublier qu'il y a des gens autour qui pourrait avoir conscience de ce que je fais. Par contre, contrairement à moi, il ne voit pas ce qui se passe dans ma tête. Vous êtes pas chanceux, parce c'est vrai que de votre point de vue, je peux être légèrement (et je dis bien légèrement!) difficile à suivre... Bon, ok, je peux être totalement conne aussi, mais tout a un sens quand je le fais. (Toujours dans ma tête!)
L'affaire, c'est que mon subconscient choisi toujours le moment le plus inoportun pour faire remonter une bulle d'azote. Je suis certaine à 95% qu'il conspire contre ma petite personne, mais je vis très bien avec. Ça paraît peut-être pas comme ça, mais ça prend beaucoup de travail pour arriver à ce niveau d'inhibition. Oui oui!! Qui sait, un jour la science vous permettra peut-être de venir faire un tour guidé dans ma tête. Croyez-moi, c'est encore mieux qu'un voyage dans l'espace. «Being Juli», dans une porte près de chez vous!!! Comme c'est encore impossible, je me suis dite que pour le moment, je pourrais essayer (et je dis bien essayer!) de vous expliquer le fonctionement psychique d'un fou.
Plus j'y pense, plus ça me semble difficile comme tâche. La première caractéristique d'un fou, c'est de ne pas vraiment réfléchir à ce que l'on fait, donc expliquer comment on y parvient, c'est dur! Par contre, il ne faut pas croire qu'on ne pense jamais! On y pense toujours, mais après... Oh shit, pourquoi je viens de faire ça moi? Ce bout-là, c'est facile, tout le monde peut y parvenir, là où la fibre folie embarque, c'est quand on se rend compte qu'on a vraiment l'air imbécile, mais que ce n'est pas grave. La fameuse phrase «Le ridicule ne tue pas», c'est vraiment vrai, parce que je serais morte il y a de ça longtemps. Mon cerveau roule tout le temps. Par rouler, je veux dire divaguer. Quelqu'un dit quelque chose, c'est sûr que je penserai à une absurdité que moi, je trouverai vraiment très drôle. Parce que moi, j'ai un contexte. Pas vous. Donc au fond, vous croyez que je suis folle, mais je suis une personne réfléchie. Oui oui!!
Le deuxième critère pour arriver à mon type de folie, c'est justement l'absurdité. Quand je dis absurde, vous pensez probablement «Oh, juste besoin de dire quelque chose qui n'a pas rapport et j'y arriverai. Pas ben compliqué!» ERREUR!!! Il faut trimer dur pour être absurde!! C'est tout un travail pour y arriver. Il faut se rendre au cinquième ou sixième degré pour sortir quelque chose de vraiment absurde. Et le tout se passe très vite, il faut être vraiment très alerte, sinon on n'est pas fou, juste stupide. Quand on répond, les gens disent que ça n'a aucun sens, mais ce n'est pas vrai du tout, c'est juste que le sens est un peu loin... Si j'explique, ils comprendront. C'est un travail de plus pour le fou social. Le fou tout court s'en fou de ne pas être compris, mais le fou social se doit d'expliquer son point de vue. Ça ajoute un niveau de difficulté.
Le tout de ces capacités se doit d'être accompagné d'une qualité très importante: l'indulgence. Des fois, la clarté évidente de ce que l'on dit n'est point comprise par nos interlocuteurs, alors il faut les rassurer. Ce n'est pas grave s'ils ne comprennent pas et ils ne doivent pas se sentir diminués en rien. Ils ne sont juste pas aussi intelligent que nous, les fous. Mais il ne faut pas leur faire sentir, ce n'est pas gentil. Alors on sort une autre absurdité pour qu'il croient qu'on a un problème, et la tension disparaît. C'est vraiment une job à temps plein. On sait qu'on est passé maître dans la folie quand on s'aperçoit qu'on a même pas besoin de penser à toutes les étapes pour y parvenir. Certain y arrive plus vite que d'autres, mais tous peuvent y parvenir, je vous l'assure...